mardi 17 décembre 2013

La bénédiction des Minim - racines et évolution du concept dans la littérature rabbinique



Enjeux actuels autour de la bénédiction des Minim

S’il est vrai que la question des Minim en général suscite un certain intérêt dans la communauté des chercheurs du judaïsme de l’Antiquité tardive, la bénédiction des Minim[1], birkat ha-minim[2], quant à elle, est un champ de recherche très fréquenté et distinct de la question générale des Minim. Comprise au début comme une mesure antichrétienne qui a marqué la rupture entre les deux religions, elle a ensuite été considérée comme le signe de l’exclusion des synagogues des judéo-chrétiens, c'est-à-dire des juifs chrétiens – et non des chrétiens tout court, compris dans le sens de pagano-chrétiens.
Deux textes des deux talmuds, un premier du Bavli (TB Berakhot 28b) et un second du Yerushalmi (TJ Berakhot 4,3) placent la décision de la birkat ha-minim à Yavné, mot-clé qui sous-entend traditionnellement qu’il s’agit de la réorganisation du judaïsme sans Temple par les rabbins à la fin du premier siècle, par Yohanan ben Zakaï dans un premier temps, puis par son successeur Rabban Gamaliel de Yavné.
Les récentes allégations de Boyarin[3] sur ce sujet remettent en question un consensus largement établi d’une bénédiction des Minim comme institution yavnéenne, compris comme un concile ou un rassemblement des rabbins qui réorganisa le judaïsme après la destruction du Temple. En réalité, Boyarin conteste purement et simplement l’existence d’un Yavné à la fin du premier siècle : « A mon avis, la Yavneh du Bavli est l’icône de la yeshiva stammaïte. […] ces récits doivent être interprétés comme mythopoiesis talmudique plutôt que comme une éventuelle historiographie ou mémoire talmudique de la première période (tannaïtique) du mouvement rabbinique ». Boyarin adopte donc une posture radicalement opposée à la vision traditionnelle puisqu’il affirme que Yavné est un mythe créé par les rédacteurs stammaïtes du Talmud de Babylone.
Shaye Cohen dans son essai sur Yavné a une position plus nuancée. Il reconnaît certes que les décisions de Yavné n’ont pris effet sur le judaïsme que progressivement, mais il ne remet pas en cause l’existence d’une activité des Sages de Yavné à la fin du premier siècle[4].
Boyarin a tendance à fortement minimiser les traces possibles d’une lente évolution qui partirait du Yavné réel du premier siècle, un groupe de juifs non dominant dans le paysage juif, et qui aboutirait à une hégémonie lors de la rédaction du Talmud de Babylone.
Nous allons donc focaliser notre attention sur les traces d’un Yavné réel à l’époque tannaïtique, même s’il ne porte pas explicitement ce nom-là, dans la Mishna et la Tosefta, afin d’essayer de reconstruire l’histoire de la bénédiction des Minim.

Avant de nous lancer dans cette analyse, nous allons examiner le contexte d’occurrence de cette bénédiction : la prière communautaire dite à la synagogue.

La récitation de la ‘Amida à la synagogue

Il est difficile de parler de la bénédiction des Minim sans comprendre la fonction qu’elle est censée occuper dans le contexte de la prière synagogale.
En effet, si l’on ouvre un siddur actuel, la bénédiction des Minim est la douzième des « 18 bénédictions », prière centrale du judaïsme synagogal appelée également ‘Amida, car elle est récitée debout. Le Talmud[5] attribue l’origine de cette prière aux Sages de la mythologique Grande Assemblée (kneset ha-gedola כנסת הגדולה), c'est-à-dire à l’époque du Second Temple. Mais, comme l’a montré E. Fleischer[6], il n’a pas existé dans le judaïsme de prière obligatoire communautaire se déroulant à la synagogue avant la fin du premier siècle. Selon Fleischer, ce sont les Sages à Yavné qui instituèrent le caractère obligatoire de la prière et fixèrent, ou tentèrent de fixer, son contenu exact.
Fleischer montre que dans les sources du Second Temple, la prière juive était personnelle, non obligatoire, sans rituel ni texte défini. De plus, la synagogue n’était pas un lieu de prière, mais essentiellement de rassemblement, d’étude et d’ablutions rituelles.
Si l’on peut admettre les conclusions de Fleischer sur l’absence de prière synagogale avant la fin du premier siècle, il est plus difficile de mettre en cohérence sa vision de Yavné comme départ d’une ‘Amida fixée et récitée de manière communautaire avec la vision du Yavné tardif et mythopoiétique proposée par Boyarin. Nous allons tenter de voir s’il y a un ajustement possible de ces deux approches.
Il est vrai que la Mishna ne parle pas des Sages de Yavné ou de leur assemblée. Cependant, sans prononcer le mot Yavné, elle relate bien l’institution de la prière obligatoire et figée en mentionnant les désaccords des Sages entre eux sur ce sujet. Le chapitre 4 de Berakhot est consacré à ces discussions.
En M Berakhot 4,3-4, R. Yehoshua‘, contemporain de Rabban Gamaliel de Yavné, n’accepte pas le texte complet de la ‘Amida mais lui préfère un résumé, tandis que Rabbi ‘Aqiva de la génération suivante propose un compromis : si la prière est familière au récitant, il la récite dans sa version complète, sinon, dans sa version résumée. Quant à R. Eliézer, contemporain de R. Gamaliel et R. Yehoshua‘, il s’oppose au caractère fixé du texte, prétextant que la prière perd ainsi son aspect de supplication spontanée. Cette dernière assertion illustre bien en quoi consiste la décision de Rabban Gamaliel : imposer une version unique à une prière qui était auparavant fluctuante, diversifiée et très dépendante de l’improvisation du récitant.
On peut remarquer la cohérence de l’évolution entre la génération de R. Yehoshua et celle de R. ‘Aqiva : la première génération voit se cristalliser les oppositions, tandis qu’Aqiva propose un compromis fondé sur le constat que le texte obligatoire de la prière est devenue familier à un certain nombre.
S’il est donc difficile de parler d’un concile de Yavné juste après la destruction du Temple, qui aurait réuni les rabbins de cette génération et qui aurait fixé la ‘Amida comme prière instituée dans les synagogues, on peut tenter raisonnablement de reconstituer les évènements de la manière suivante : entre la destruction du Temple et la rédaction de la Mishna, des Sages juifs, probablement issus de courants différents, mais « doctrinalement compatibles » tels que les scribes d’une part et les pharisiens d’autre part[7], instituent une prière fixe dans les synagogues autrefois dédiées à l’étude, à la lecture biblique, aux débats et bains rituels. Il n’est pas irrecevable de penser qu’un tel changement liturgique ait pu se dérouler sur près d’un siècle et qu’il soit contemporain de l’association des deux hairesis, scribes et pharisiens. S’il n’y a pas de concile de Yavné dans la Mishna, il y a cependant une activité qui correspond à ce que les sources talmudiques plus tardives ont appelé Yavné, comme un nom de code pour parler de cette période de transformations. Au lieu d’avoir duré quelques années, comme suggéré par les talmuds, elle aurait duré en réalité pas moins d’un ou deux siècles.

Première mention formelle de la bénédiction des Minim

Les Minim et les Paroshim

Il est certain qu’au moment de la publication de la Mishna, vers 200, la ‘Amida existe comme pratique synagogale, obligatoire et communautaire. Cependant, comme le fait remarquer Herford[8], « il est remarquable que la Mishna passe sous silence le célèbre changement dans la liturgie opéré par Gamaliel II à Yavné quand la ‘formule concernant les Minim’ a été fixée ». Il est donc permis, avec Boyarin[9], de douter de l’existence de cette bénédiction dans la ‘Amida avant le début du 3e siècle, puisque sa toute première mention se trouve dans un texte de la Tosefta que nous allons examiner.
Notons qu’Elbogen[10] a vu dans l’intervention de Samuel le Petit une création originale de la bénédiction des Minim et traduit le mot תיקן, tiqqen de TB Berakhot 28b par "composer" ou un verbe équivalent montrant qu’il n’y a pas d’antériorité.
Il est cependant probable qu’il ait existé avant la bénédiction des Minim une sorte de prototype qui condamnait non pas explicitement des Minim, mais d’autres groupes du judaïsme du Second Temple. Selon Flusser, une bénédiction initiale était adressée contre les esséniens[11]. Cette hypothèse se fonde sur la multiplicité des noms figurants dans les diverses versions de la birkat ha-minim, מסורות (informateurs, traîtres), חנפים (hypocrites), רשעים (méchants), מלשינים (informateurs, traîtres), mais également sur un texte de la Tosefta qui est la plus ancienne mention de la birkat ha-minim.
תוספתא: ברכות, ג, כה
שמונה-עשרה ברכות שאמרו חכמים כנגד שמנה-עשרה אזכרות שב"הבו לייי בני אלים". כולל של מינים בשל פרושין. ושל גרים בשל זקנים. ושל דוד בבונה ירושלם. אם אמר אלו לעצמן ואילו לעצמן יצא.
T Berakhot 3,25
Les Sages ont établi dix-huit bénédictions en regard des dix-huit mentions du Psaume 29 "Rendez au Seigneur, ô fils de Dieu". Y compris celle des Minim en raison des Peroshim. Celle des Prosélytes (ger) en raison des Anciens. Celle de David en raison du "bâtisseur de Jérusalem". S'il dit ces premières pour elles-mêmes et les secondes pour elles-mêmes, il est quitte.
Mimouni fait un historique des commentaires de ce passage[12]. Il cite les auteurs ayant proposé la conjecture פושעים« poshe‘im » au lieu de פרושים « perushim » : Marmorstein, M. Simon voient dans ces פושעי ישראל « poshe'ey israel » des chrétiens d'origine juive. Puis F. Manns propose de conserver פרושים « perushim » et les identifie aux esséniens sur la base du texte de Qumran 4QMMT (מקצת מעשי התורה). L'idée est que פורשים   n''est pas vocalisé perushim, les pharisiens, mais paroshim, les séparés. C’est aussi l’avis de Flusser[13].
Cette trouvaille géniale vient de S. Lieberman dans son commentaire de la Tosefta[14].
Lieberman ne voit aucune raison de réaliser la correction en פושעין poshe‘in car tous les manuscrits donnent פרושין perushin. Il est donc impensable selon lui que ce soit une erreur de copie.
Il propose donc une correction mineure de vocalisation et de lire פרושים, les paroshim (séparés) et non les perushim (pharisiens), c'est à dire des personnes qui se sont séparées du public et donc l'existence a précédé l'apparition des Minim. De plus, il cite à l’appui un certain nombre de textes des sources rabbiniques mentionnant le terme פרוש vocalisé parosh et signifiant « séparé »[15].
Selon Liebermann (et tous les autres à sa suite), la bénédiction des Minim ne serait qu'une mise à jour de la bénédiction existante des paroshim (séparés), ce que suggère l’emploi du mot תיקן, à la fois corriger et décréter, dans TB Berakhot 28a.

La birkat ha-minim dans les additions à la ‘Amida pour les jours de jeûne

Il existe une mention encore plus explicite de la birkat ha-minim dans un autre texte de la Tosefta qui rapporte une discussion sur les additions à la ‘Amida pour les jeûnes publics (ta’anit).
תוספתא: תעניות, א, י
או' לפניהן עשרים וארבע ברכות, שמונה עשרה שבכל יום, ושש היה מוסיף.
שביעית. סמכוס או'. משפיל הרמים היא ברכת המינין. היכן אומ'. בין גואל לרופא חולים. עונין אמן על כל ברכה וברכה. תוקעין ומריעין ותוקעין. כך היו נוהגין בגבולין.
T Taanit 1,9-10
On dit vingt-quatre bénédictions, les dix-huit bénédictions quotidiennes et en ajoute six.
Une septième, Sumkhos dit : "Celui qui abaisse ceux qui s’élèvent", c’est la bénédiction des Minim. A quel endroit la prononce-t-on ? Entre (la bénédiction du) rédempteur et (la bénédiction de celui) qui soigne les malades. On répond « amen ! » à chaque bénédiction. On sonne (le shofar) teqi‘a (note pleine) teru‘a (trémolo) teqi‘a (note pleine). Ainsi pratiquait-on dans les territoires périphériques (du Temple).[16]
Le Sage qui rapport cette tradition est סוּמכוֹס : Sumkhos ben Yossef (voir TB Shabbat 27b, TJ Berakhot 2,1), éminent disciple de Rabbi Méir, traditionnellement identifié comme appartenant à la sixième génération de tannaïm (170-200).
Pour les jours de jeûnes publics (תענית, ta‘anit) la ‘Amida comporte un ajout de sept bénédictions supplémentaires.
La mishna ci-après donne la liste de tous les ajouts qui font chacun référence à un personnage de l’Histoire d’Israël qui a été exaucé. Cette mention se positionne donc à la fin du ‘corps’ de la bénédiction normale et juste avant la ḥatima, la conclusion de la bénédiction, qui commence par ברוך אתה ה barukh ’ata hashem. La partie changeante de la ḥatima, commeגואל ישראל, go’el israel, ‘rédempteur d’Israël’, ou מכניע זדים, makhnia‘ zedim, ‘qui soumet les méchants’, est utilisée comme nom identifiant de la bénédiction. Par exemple au lieu de dire ברכת המינים, birkat ha-minim, la bénédiction des Minim, ont dit מכניע זדים, makhnia‘ zedim « celui qui soumet les méchants » pour l’évoquer.
Mishna Ta’anit 2,4
על הראשונה--הוא אומר מי שענה את אברהם בהר המורייה, הוא יענה אתכם וישמע קול צעקתכם ביום הזה; ברוך אתה ה' גואל ישראל.
ל השנייה--הוא אומר מי שענה את אבותיכם על ים סוף, הוא יענה אתכם וישמע בקול צעקתכם ביום הזה; ברוך אתה ה' זוכר הנשכחות.
על השלישית--הוא אומר מי שענה את יהושוע בגלגל, הוא יענה אתכם וישמע בקול צעקתכם ביום הזה; ברוך אתה ה' שומע תרועה.
על הרביעית--הוא אומר מי שענה את שמואל במצפה, הוא יענה אתכם וישמע בקול צעקתכם ביום הזה; ברוך אתה ה' שומע צעקה.
על החמישית--הוא אומר מי שענה את אליהו בהר הכרמל, הוא יענה אתכם וישמע בקול צעקתכם ביום הזה; ברוך אתה ה' שומע תפילה.
על השישית--הוא אומר מי שענה את יונה במעי הדגה, הוא יענה אתכם וישמע קול צעקתכם ביום הזה; ברוך אתה ה' העונה בעת צרה.
על השביעית--הוא אומר מי שענה את דוד ושלמה בנו בירושלים, הוא יענה אתכם וישמע בקול צעקתכם ביום הזה; ברוך אתה ה' המרחם על הארץ.
Voici la traduction du premier et du dernier ajout :
A la première (addition à la ‘Amida), on dit : « celui qui a répondu à Abraham sur le mont Moria, c’est lui qui vous répondra et écoutera la voix de votre cri en ce jour. Béni sois-tu Eternel, celui qui rachète Israël »
[…]
A la septième (addition à la ‘Amida), on dit : « celui qui a répondu à David et Salomon son fils dans Jérusalem, c’est lui qui vous répondra et écoutera la voix de votre cri en ce jour. Béni sois-tu Eternel, celui qui fait miséricorde sur la terre »
Le TB rapport une tradition semblable[17] qui permet de préciser que ces sept bénédictions supplémentaires s’intercalent entre la septième et la huitième bénédiction ordinaire (גואל ישראל  « go’el israel », ‘rédempteur d’Israël’ et רופא חולים « rofé’ ḥolim », ‘qui guérit les malades’) de la ‘Amida ‘ordinaire’[18] :
Selon Saul Lieberman[19], dans le passage de la Tosefta, Sumkhos s’oppose à la formule de clôture (ḥatima) המרחם על הארץ, ha-meraḥem ‘al ha-aretz « qui fait miséricorde sur la terre » de la septième bénédiction supplémentaire et souhaite la remplacer parמשפיל הרמים, mashpil ha-ramim, « qui abaisse ceux qui s’élèvent », en référence à la bénédiction des Minim (מכניע זדים).
A. Marmorstein[20] analyse ces vingt-quatre bénédictions dans leur version du texte de la Mishna et dans celle d’un fragment du British Museum (No. 5557 P. pp. 25a-26b) qui contient une ‘Amida pour les jours de jeûne public datant de la période des géonim. La formule משפיל הרמים,  mashpil ha-ramim n’apparaît ni dans la Mishna, ni dans le fragment, ce qui signifie que, sous réserve d’avoir bien compris le texte lapidaire de la Tosefta, l’opinion de Sumkhos de remplacer המרחם על הארץ,  ha-meraḥem ‘al ha-aretz par  משפיל הרמים,  mashpil ha-ramim n’a pas été retenue comme halakha.
Par ailleurs, Lieberman propose de corriger משפיל הרמים,  mashpil ha-ramim "qui abaisse ceux qui s’élèvent" : par משפיל ומרים,  mashpil u-merim "qui abaisse et qui élève" ou encore par משפיל ההרים,  mashpil hé-harim "qui abaisse les montagnes", tout en soulignant que la version משפיל הרמים,  mashpil ha-ramim est aussi présente dans la version du TJ.
Soumkhos a vraisemblablement l’intention d’ajouter une septième bénédiction supplémentaire pour les jours de jeûne. Cette bénédiction aurait en quelque sorte la même fonction que la bénédiction des Minim dans les dix-huit principales. Bien que cette proposition ne semble pas avoir eu de conséquence sur le rituel de prière tel qu’on le connaît, cette mention d’une birkat ha-minim dans la Tosefta avec le nom d’un Sage de la fin du 2e siècle renforce l’idée d’une apparition d’une bénédiction destinée aux Minim non pas à la fin du premier siècle, mais cent ans plus tard.

 Des traces dans la Mishna

Après avoir étudié les textes de la Tosefta qui font les premières mentions d’une bénédiction des Minim dans la ‘Amida, il me paraît judicieux de mentionner un passage de Berakhot qui, sans mentionner d’institution formelle d’une bénédiction des Minim, et surtout pas à Yavné, témoigne pourtant d’une pratique qui ressemble à ce qu’évoquent plus tard les deux talmuds.
ברכות, ה, ג
האומר. על קן ציפור יגיעו רחמיך. ועל טוב יזכר שמך. מודים מודים. משתקים אותו. העובר לפני התיבה וטעה. יעבור אחר תחתיו. לא יהי סורבן באותה שעה. מניין הוא מתחיל. מתחילת הברכה שטעה זה.
ברכות, ה, ה
המתפלל וטעה סימן רע לו. ואם שליח ציבור הוא סימן רע לשולחיו. ששלוחו שלאדם כמותו.
M Berakhot 5,3
Celui qui dit « ta miséricorde atteindra le nid de l’oiseau », et « ton nom sera prononcé pour le bien », « nous te rendons grâce, nous te rendons grâce », on le fait taire. Celui qui passe devant l’arche et se trompe, un autre passera à sa place, un qui ne refusera pas à cette même heure. A partir de quand commence-t-il ? Au début de la bénédiction dans laquelle l’autre s’est trompé.
M Berakhot 5,5
Celui qui prie et qui se trompe : c’est un mauvais signe pour lui. Si c’est un envoyé du public, c’est un mauvais signe pour ceux qui l’ont mandaté, car le mandataire de quelqu’un est comme cet homme.
Cette tradition possède un passage synoptique qui lui ressemble fortement, toujours dans la Mishna :
משנה: מגילה, ד, ט
האומר. יברכוך טובים. הרי זו דרך המינות. על קן ציפור יגיעו רחמיך. ועל טוב יזכר שמך. מודים מודים. משתקים אותו. והמכנה בעריות משתקים אותו. האומר "ומזרעך לא תתן להעביר למולך. משתקים אותו בנזיפה.
M Megila 4,9
Celui qui dit : « que les bons te bénissent », c'est une pratique de Minut (hérésie) « ta miséricorde atteindra le nid de l’oiseau » et « ton nom sera prononcé pour le bien ». « nous te rendons grâce, nous te rendons grâce »,. On le fait taire.
Celui qui interprète (figurativement) les interdits sexuels, on le fait taire.
Celui qui dit « Et de ta descendance tu ne donneras pas à passer [au feu] de Moloch » (Lv 18,21) : tu ne passeras pas tes enfants par les armes. On le fait taire comme [premier degré de l'] excommunication
Ces deux passages traitent clairement de la récitation de la prière et des erreurs intentionnelles que le récitant pourrait introduire. Dans Berakhot comme dans Megilla, la Mishna interdit des formulations qui rappellent clairement l’hérésie des deux Puissances dans le Ciel et qui n’est autre qu’un binitarisme juif, c'est-à-dire la croyance en un Logos-Memra hypostasié, égal à Dieu[21]. La répétition de מודים, modim, « nous te rendons grâce » alors que le texte officiel de la dix-huitième bénédiction comporte une seule fois ce mot, serait la marque de la croyance bithéiste[22], tout comme la mise au pluriel יברכוך טובים « que les bons te bénissent » qui remplace « le bon » au singulier.
Le dualisme gnostique qui comporterait un dieu bon et un dieu mauvais ne semble pas visé par ce texte, puisqu’il parle de bons au pluriel.
Il n’est pas nécessaire de s’attarder sur les autres phrases condamnées[23], car ces deux passages nous démontrent qu’à l’époque de la rédaction de la Mishna, les Sages voulaient évincer les shelihé ha-tzibur, les récitants de la prière qui introduisaient des formules hérétiques, selon une voie de Minut. Le texte de Berakhot dit que si ce récitant s’est trompé, on le fait taire et on en prend un autre qui dira correctement la bénédiction, selon une formule officielle des rabbins.
Certes, il n’y a pas mention d’une bénédiction spécifique contre les Minim qui permet au Min de s’auto-exclure. En revanche, il y a une volonté claire de réduire au silence, par le même procédé de contrôle du récitant, les juifs identifiés comme hérétiques. Cet état de fait correspond à une situation où les rabbins ne sont pas suffisamment dominants pour imposer une bénédiction des Minim qui dissuaderait les hérétiques de venir comme envoyés du public, mais ils sont dans une phase de prise de contrôle idéologique où ils tentent déjà de les distinguer des autres, de les faire taire et de les dissuader. Berakhot 5,5 est éloquent sur l’ambiance à l’intérieur de la synagogue puisqu’il met en évidence que ce sont des groupes d’individus qui envoient un sheliah ha-tzibur, une personne mandatée, pour réciter la prière.
Il est également intéressant de noter que ce n’est pas le christianisme en soi, ni même le judéo-christianisme, qui inquiète les rabbins, mais plus généralement le bithéisme répandu chez les juifs. Boyarin cite d’ailleurs le texte de Megilla comme preuve de l’implantation du binitarisme en milieu synagogal[24]. Il est curieux qu’il ne note pas ce texte comme révélateur d’une attitude préfigurant l’apparition formelle de la birkat ha-minim.

La birkat ha-minim dans les deux talmuds

Notre champ d’étude se limite à la période tannaïtique, mais la comparaison du texte de la Tosefta avec les versions du Talmud devrait nous permettre de préciser ce que l’on peut dire et ne pas dire de la birkat ha-minim à l’époque tannaïtique.
Le texte le plus ancien est certainement celui du Talmud de Jérusalem, dont la rédaction finale a lieu dans la première moitié du 5e siècle :
ירושלמי,ברכות: ד, ג
אמ' ר' לוי. כנגד שמונה-עשרה הזכרות שכת' ב"הבו לי'י בני אלים". אמ' ר' חונה. אם יאמר לך אדם. שבע-עשרה אינון. אמור לו. שלמינין כבר קבעו חכמ' ביבנה.
TJ Berakhot 4,3
Rabbi Lévi a dit : en regard des dix-huit mentions qui sont écrites dans (le psaume 29) « Rendez au Seigneur, ô fils de Dieu ». Rav Houna a dit : si un homme te dit : elles sont dix-sept, dis-lui que pour (la bénédiction qui concerne) les Minim, les Sages l’ont déjà établie à Yavné.
Ce texte est très proche de celui de la Tosefta. Il mentionne la référence au psaume 29 comme source du chiffre 18 des dix-huit bénédictions. Il parle de la bénédiction des Minim, mais omet celle des paroshim, les séparés, mentionnés par la Tosefta. Il rajoute le concept de Yavné absent du texte de la Tosefta.
Un autre passage du TJ commente la Mishna qui indique l’obligation de reprendre la prière lorsqu’on s’est trompé :
ברכות ב,ג. קרא וטעה יחזור למקום שטעה.
M Berakhot 2,3 Celui qui récite et se trompe doit reprendre à l’endroit de son erreur.
Le TJ commente ainsi :
ירושלמי,ברכות: ב, ג
ותני עלה. כולל שלמינים ושלרשעים במכניע זדים. ושלגרים ושלזקינים במבטח לצדיקים. ושלדוד בבונה ירוש'. "אחר ישובו בני יש' ובקשו את י'י אלהיהם ואת דוד מלכם".
TJ Berakhot 2,3
Il a été enseigné à propos de cette mishna : cela comprend (les mots) ‘Minim’ et ‘Méchants’ dans (la bénédiction) « soumets les mauvais ». Et ‘prosélytes’ et ‘anciens’ dans (la bénédiction) « un refuge pour les justes ». Et ‘David’ dans ‘celui qui bâtit Jérusalem. (Osée 3,5) : « Après cela, les enfants d'Israël reviendront; ils chercheront l'Éternel, leur Dieu, et David, leur roi ».
Ce texte présente une variété de bénédictions qui doivent être prononcées correctement sous peine de devoir faire répéter le récitant (on suppose qu’il s’agit de l’envoyé du public) :
-       la bénédiction qui se clôt par « qui soumet les mauvais » est bien la bénédiction que l’on appelle habituellement bénédiction des Minim (la douzième) ;
-       celle qui se clôt par « un refuge pour les justes » est la bénédiction des justes (la treizième) ;
-       celle qui se clôt par « qui bâtit Jérusalem » est la bénédiction de la construction de Jérusalem (la quatorzième).
On peut noter que les bénédictions « sensibles » sont différentes de celles identifiées par les textes de la Mishna étudiés au paragraphe précédent. Si le processus d’identification et d’excommunication de l’hérétique récitant est tout à fait semblable, les préoccupations hérésiologiques des rabbins semblent avoir changé depuis l’époque de la Mishna.
Cette tradition du TJ se retrouve avec des gloses, des explications et des remaniements dans le midrash Tanhuma, un midrash compilé au 9e siècle et d’origine palestinienne :
תנחומא: ויקרא, ב
ילמדנו רבינו. העובר לפני התיבה וטעה ולא אמר קללת המינים מהו להחזירו. כך שנו רבותינו. העובר לפני התיבה וטעה ולא אמר ברכת כהנים ובכל הברכות כולן אין מחזירין אותו. אבל טעה בקללת המינים מחזירין אותו ואומרה בעל כרחו. חיישינ' שמא מין הוא. אלא מחזירין אותו שאם יהיה בו צד מינות מקלל את עצמו ויענו הקהל אמן. וכן כל מי שלא אמר. בונה ירושלם. חיישינן שמא כותי הוא.
Tanḥuma Vayiqra 2
Nos maîtres ont enseigné : celui qui passe devant l'arche (récite la prière) et se trompe et ne dit pas la malédiction des Minim, on doit le faire répéter. Voici ce que nos maîtres ont enseigné : celui qui passe devant l'arche et ne dit pas la bénédiction des Cohanim (prêtres) et pour toutes les autres bénédictions, on ne le fait pas répéter. Mais s'il s'est trompé dans la malédiction des Minim, on le fait répéter et il la dit de force, parce qu'on le suspecte d'être un Min. Puisqu'en le faisant répéter, s'il est du côté de l'hérésie (minut), il se maudit lui-même et l'assemblée répond Amen. Et de même, toute personne qui ne dit pas "qui construit Jérusalem", on le suspecte d'être un samaritain.
Le texte du Tanḥuma décrit de façon très explicite la procédure qui amène le Min à s’auto-maudire publiquement. Il fait également la distinction entre le groupe des Minim qui doit s’auto-maudire par la malédiction des Minim et le groupe des samaritains qui est concerné par la malédiction du bâtisseur de Jérusalem.
L’institution de la bénédiction des Minim par Samuel le Petit est rapportée dans le TJ dans le passage suivant :
ירושלמי ברכות ה,ג
העובר לפני התיבה וטעה. ר' יוסי בן חנינה בשם ר' חנניה בן גמליאל. טעה בשלש ברכות הראשונות חוזר בתחילה. אדא בר בר חנה גניבה בשם רב. טעה בשלש ברכות האחרונות חוזר לעבודה.
ר' חלבו רב חונה בשם רב. טעה בשלש ברכות הראשונות חוזר בתחילה. בשלש ברכות האחרונות חוזר לעבודה. טעה ואינו יודע איכן טעה חוזר למקום הברור לו.
ר' אחא ור' יודה בן פזי יתבין בחד כנישתא אתי. עבר חד קומי תיבותא ואשגר חד ברכה. אתון ושיילון לר' סימון. אמ' לון ר' סימון בשם ר' יהושע בן לוי. שליח ציבור שהשגיר שתים שלש ברכות אין מחזירין אותו. אשכח תניי ופליג. לכל אין מחזירין אותו חוץ ממי שלא אמ' מחיה המתים ומכניע זדים ובונה ירוש'. אני או'. מין הוא.
 שמואל הקטן עבר קומי תיבותא ואשגר מכניע זידים בסופה. שרי משקיף עליהון. אמרין ליה. לא שיערו חכמ' כך.
TJ Berakhot 5,3
Celui qui passe devant l’arche et fait une erreur. Rabbi Yossé ben Hanania dit au nom de Rabbi Hannania ben Gamliel : s’il s’est trompé dans les trois premières bénédictions, il recommence depuis le début. Ada bar bar Hana Gniva au nom de Rav : s’il s’est trompé dans les trois dernières bénédictions, il recommence à la bénédiction du « culte » (la 17e).
Rav Helbo (au nom de) Rav Houna au nom de Rav : s’il s’est trompé dans les trois premières bénédictions, il recommence depuis le début. S’il s’est trompé dans les trois dernières bénédictions, il recommence à la bénédiction du « culte ».
S’il s’est trompé mais ne sait plus où, il recommence à partir de l’endroit qui est clair pour lui.
Rabbi Aha et rabbi Youda ben Pazi étaient assis dans la même synagogue. Quelqu'un passa devant l'arche et improvisa une bénédiction. Ils allèrent trouver et interrogèrent Rabbi Simon. R. Simon leur dit au nom de R. Yehoshua ben Lévi : l’envoyé du public (sheliaḥ ha-tsibur) qui improvise deux ou trois bénédictions, on ne le reprend pas. On a trouvé dans une baraïta quelque chose de contradictoire : on ne reprend pour aucune des bénédictions, sauf pour celui qui ne dit pas « qui ressuscite les morts » (N°1), et « qui soumet les mauvais » (N°12) et « qui construit Jérusalem » (N°14), [car] je dis : c'est un Min.
Samuel le Petit passa devant l'arche (récita la prière) et changea (improvisa) la bénédiction des Minim (qui se termine par « qui fait fléchir les méchants ») à la fin. Les maîtres attendirent de lui et lui dirent : les Sages n'ont pas pensé à toi ! (en composant cette bénédiction).
Dans cette version, on trouve, comme dans TJ Berakhot 2,3, des bénédictions qui doivent être répétées si elles sont récitées incorrectement. Il s’agit des bénédictions numéros une, douze et quatorze, alors que le TJ cite les numéros douze, treize et quatorze. On a pour la première fois la mention de Samuel le Petit sans toutefois mentionner le contexte yavnéen comme c’est le cas dans la version du Bavli :
ברכות כ"ח ע"א
ת'ר. שמעון הפיקולי הסדיר שמונה-עשרה ברכות לפני רבן גמליאל על הסדר ביבנה. אמ' להם ר'ג לחכמים. כלום יש אדם שיודע לתקן ברכה למינים. ירד שמואל הקטן ותיקנה.
לשנה אחרת שכחה. השקיף שתים ושלש שעות ולא העלוהו. אמאי לא העלוהו. והאמ' רב יהודה אמ' רב. טעה בכל הברכות כולן אין מעלין אותו. טעה בברכת המינין מעלין אותו. חיישינן שמא מין הוא. שאני שמואל הקטן דהוא תיקנה.
TB Berakhot 28a
Nos maîtres ont enseigné : Shimon ha-Peqoli rédigea les dix-huit bénédictions devant Rabban Gamaliel, dans leur ordre, à Yavné. Rabban Gamaliel dit aux Sages : quelqu'un sait-il corriger (ou formuler) une bénédiction pour les Minim ? Shemuel ha-qatan (Samuel le Petit) se leva et la corrigea (ou la formula).
L'année suivante, il l'oublia et tenta de se la remémorer pendant deux à trois heures et on ne le fit pas monter (on ne l’interrompit pas). Pourquoi ne l’interrompit-on pas ?
Rav Yehuda a dit : Rav a dit : s'il s'est trompé dans toutes les bénédictions, on ne le fait pas monter (on ne l’interrompt pas). S'il s'est trompé sur la bénédiction des Minim, on le fait monter (on l’interrompt) car on suspecte qu'il soit un Min. C’est différent pour Samuel le Petit, car c’est lui qui l'a établie (la bénédiction des Minim).
La version babylonienne de l’institution de la birkat ha-minim comporte encore des évolutions par rapport à la version palestinienne. Les mentions de Yavné, de Rabban Gamaliel et de Shimon le cotonnier s’ajoutent à celle de Samuel le Petit dans une sorte de théâtralisation de l’évènement. Il n’y a désormais plus que la bénédiction des Minim qui fait l’objet d’une répétition nécessaire en cas d’erreur, en raison de la suspicion d’hérésie.

Conclusion sur la bénédiction des Minim

Au terme de ce parcours chronologique au sein des textes tannaïtiques et talmudiques, nous proposons une reconstruction historique qui nous apparaît plausible.
Après 70, les groupes des scribes et des pharisiens, doctrinalement compatibles entre eux, mais non dominants au sein des synagogues qui sont fréquentées également (mais pas seulement) par des juifs bithéistes, veulent imposer la prière obligatoire et communautaire dans la synagogue comme substitut du culte du Temple détruit. Le texte n’est pas fixé et encore soumis à improvisations du récitant. La Mishna relate des désaccords entre rabbins de tendances différentes, sur le caractère obligatoire de la prière, sur sa forme complète ou résumée.
Parmi les juifs tenants de la doctrine des Deux Puissances dans le Ciel, figurent des judéo-chrétiens, mais ce n’est pas spécifiquement contre eux que les rabbins se dressent en décidant d’écarter les récitants de la prière qui énoncent des formules de bénédiction bithéistes ou binitaires. La Mishna mentionne la volonté des rabbins d’exclure les récitants bithéistes ainsi qu’un certain nombre d’hérétiques autres, dont la doctrine n’apparaît pas forcément clairement.
Il n’est pas improbable que du côté chrétien, cette activité antihérétique des rabbins à l’intérieur des synagogues dirigée essentiellement contre les juifs binitaires, soit perçue par Justin dans son Dialogue avec Tryphon, comme une marque d’hostilité antichrétienne.
Au début du troisième siècle, comme en témoigne la Tosefta, les rabbins, qui gagnent en autorité dans le milieu synagogual, parviennent à transformer une bénédiction dont l’origine remonte à l’époque du Second Temple qui était destinée aux séparatistes esséniens et aux sadducéens, et qui va désormais s’appliquer aux Minim, essentiellement aux juifs binitaires. Cette bénédiction ainsi que celle du « bâtisseur de Jérusalem » servent à exclure les récitants qui ne les approuvent pas et les prononcent incorrectement.
Au début du cinquième siècle, le Talmud de Jérusalem parle de l’instauration de la bénédiction des Minim à Yavné (TJ Berakhot 4,3) et de son auteur, Samuel le Petit (TJ Berakhot 5,3). Il souligne l’importance de faire répéter quatre des dix-huit bénédictions, dont celle des Minim, pour pouvoir exclure des récitants non orthodoxes.
Enfin, en Babylonie au 6e siècle, la bénédiction des Minim demeure la seule à être répétée lorsque le récitant s’est trompé. Son origine yavnéenne est soulignée et son lien avec Rabban Gamaliel lui-même est mis en valeur. Cette théâtralisation, combinée à la simplification en une seule bénédiction « sensible », sent le triomphalisme d’une institution bien établie qui a réussi peu à peu à imposer une formulation fixée de la prière synagogale, au départ très fluctuante et très improvisée. Un certain nombre de bénédictions, peut-être relatives aux sadducéens (qui se trompent sur la résurrection des morts), aux samaritains (c’est la glose proposée par le Tanhuma concernant la bénédiction du bâtisseur de Jérusalem) ou aux séparatistes esséniens (paroshim), sont abandonnées. La bénédiction des Minim demeure l’unique « malédiction » destinée aux hérétiques.


[1] Voici la traduction de la version de la birkat ha-minim de la Genizah de la synagogue karaïte du Caire :
« pour les meshumadim (traîtres), qu’il n’y ait pas d’espoir, et que le royaume de l’impertinence soit déraciné de nos jours, et que les notzrim (nazaréens) et les minim disparaissent en un clin d’œil, qu’ils soient effacés du livre des vivants et ne soient pas inscrits avec les justes ; béni sois-tu Seigneur qui soumets les impudents ».
Il s’agit du texte publié par S. Schechter en 1898 et traduit par S. Mimouni dans Le Judéo-Christianisme ancien, essais historiques, Paris (1998) p. 171.
[2] Pour une bibliographie sur la question de la Birkat ha-minim, voir Simon Claude Mimouni dans Le Judéo-Christianisme ancien, essais historiques, Paris (1998) pp. 168-169. Nous avons ajouté les traductions entre parenthèses et modifié l’orthographe des termes transcrits.
[3] D. Boyarin, la partition du judaïsme et du christianisme, Paris 2011, pp. 132-144.
[4] Shaye J.D. Cohen, The Significance of Yavneh:, HUCA 55 (1984), puis édité dans une collection d’article S. Cohen, The Significance of Yavneh: Pharisees, Rabbis, and the End of Jewish Sectarianism, Tübingen 2010, p. 67-68
[5] TB Megila 17b. En réalité, le Talmud rapporte dans la même page les deux temps essentiels de la constitution de la prière des 18 bénédictions : la Grande Assemblée et la période de Yavné.
                דתניא שמעון הפקולי הסדיר שמונה עשרה ברכות לפני רבן גמליאל על הסדר ביבנה אמר רבי יוחנן ואמרי לה במתניתא תנא מאה ועשרים זקנים ובהם כמה נביאים תיקנו שמונה עשרה ברכות על הסדר.
[6] E. Fleischer, לקדמוניות תפילת החובה בישראל « aux origines de la prière obligatoire en Israël », Tarbiz 59 (1990) pp. 397-441.
[7] C’est l’hypothèse intéresssante et très plausible développée par Boyarin lorsqu’il identifie deux listes de sages dans le traité Avot qui correspondent à deux « écoles de pensée », les yohaniens et les gamaliélites, qu’il propose d’identifier avec les pharisiens et les scribes. Cf. Boyarin, la partition du judaïsme et du christianisme, Paris 2011, p. 163-164.
[8] Herford, Christianity p. 313-314.
[9] Boyarin, La partition p. 132-133
[10] C’est le cas par exemple de I. Elbogen, Der jüdische Gottesdienst in seiner geschichtlichen Entwickelung, Leipzig 1913 (disponible également en anglais Jewish Liturgy: A Comprehensive History et en hébreu התפילה בישראל בהתפתחותה ההיסטורית), C. Thoma, Théologie Chrétienne du Judaïsme, Aschaffenburg 1978, pp. 255-256.
[11] David Flusser, Judaism and the Origins of Christianity Jérusalem, 1988.
[12] Mimouni, "Le Judéo-Christianisme ancien", Paris 1998 p.182-184
[13] David Flusser, Judaism and the Origins of Christianity Jérusalem, 1988.
[14] שאול ליברמן, תוספתא כפשוטה, סדר זרעים חלק א', נויורק וירושלים תשס"א עמ' 53 - 54
S. Lieberman, Tosefta Ki-fshuṭa, order Zera’im part 1, New York Jerusalem, 2001. pp. 53-54
[15] Ibid. voir note 84.
[16] Un parrallèle de cette tradition existe également dans le Talmud de Jérusalem : ירושלמי: תענית ב,ט
על השביעית. משום סומכוס אמרו ברוך משפיל רמים. ניחא שלמה דכתיב ביה: בנה בניתי בית זבול לך
TJ Taanit 2,9 : A propos de la septième : au nom de Sumkhos il a été dit : "Béni-soit Celui qui abaisse ceux qui s’élèvent".
[17] TB Taanit 15b :
                פיס'. "ואומ' לפניהם עשרים וארבע ברכות" וג' עד "ומוסיף עליהן עוד שש". שבע הויאן. דתנן. ''על השביעית הוא אומ''' )משנה. תענית ב,ד(. אמ' רב נחמן בר יצחק. מאי שביעית. שביעית לאורכות כדתניא. בגואל ישראל הוא מאריך ובחותמה הוא אומ'. מי שענה את אברהם בהר המריה הוא יענה אתכם וישמע קול צעקתכם היום הזה. ברוך גואל ישראל. והן עונין אחריו. אמן. וחזן הכנסת אומ' להן. תקעו בני אהרן תקעו.
[18] Voir aussi : A. Marmorstein, The Amidah of the Public Fast Days in The Jewish Quarterly Review, New Series, Vol. 15, No. 3 (Jan., 1925), pp. 409-418.
[19] S. Lieberman, Tosefta Ki-fshuṭa, order Mo’ed part 5, New York Jerusalem, 2001. P. 1073.

[20] Ibid.
[21] Voir Boyarin, La partition, p. 225 et suivantes.
[22] Le TB Berakhot 33b commente clairement la Mishna dans ce sens :
משום דמיחזי כשתי רשויות, « parce que cela apparaît comme Deux Puissances ».
[23] Boyarin, La partition, p. 231-232 Boyarin identifie que leTargum de Lv 18,21 indique une lecture opposée à celle de la Mishna. La condamnation dans un même texte mishnique de deux doctrines présentes dans le Targum, le binitarisme et les unions sexuelles entre israélites et païens lui font supposer que le public visé est le même.
[24] Boyarin, La partition, pp. 230-232.

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