mercredi 11 janvier 2017

Lire une page de talmud - introduction

Cet article est une sorte de memento / introduction pour découvrir comment fonctionne une page traditionnelle de Talmud, édition de Vilna. En seconde partie, une introduction rapide aux différentes couches de rédaction et des langues des différents éléments d'une page de Talmud.


Présentation d’une page du Talmud.


Dans le Talmud de Babylone, chaque folio (en hébreu דף) possède un numéro, par exemple ברכות כ' numéro 20, avec un recto, noté A ou א ou un seul point, et un verso noté B ou ב ou deux points.
Un folio comporte :
-        une partie centrale où se succèdent deux textes :
o   Les sections de la Mishna sont précédées de l’abréviation מתני'
o   Les sections de la Guemera sont précédées de l’abréviation גמ' ;
-        Entourant la partie centrale :
o   Le commentaire de Rashi, situé à l’intérieur de la page. Suivante qu’il s’agit d’un recto ou d’un verso, le commentaire sera donc situé à droite ou à gauche de la partie centrale.
o   Le commentaire des Tossafot, à l’opposé du commentaire de Rashi.





Aperçu des différentes couches de rédaction.

La Mishna :
Le mot « mishna » signifie « répétition », « enseignement ». Il s’agit d’un code de halakha publié en l’an 200 par Rabbi Yehuda ha-nassi. La Mishna recueille les opinions, jusque-là orales, des rabbins « répétiteurs », en hébreu tannaïm. Ces enseignements sont classés en 63 traités répartis en 6 ordres (semences, fêtes, femmes, dommages, saintetés, puretés). Chaque traité traite d’un sujet (exemple : les bénédictions, le shabbat, la pâque, etc.). Chaque traité comporte plusieurs chapitres, comportant chacun plusieurs paragraphes unitaires appelés « mishna » (pluriel mishnayot). La Mishna avec un m majuscule fait référence à l’ouvrage général tandis qu’une mishna est la plus petite unité d’enseignement à l’intérieur d’un traité.
La Mishna est rédigée dans un hébreu particulier qui est une langue différente de l’hébreu biblique (HB) et qu’on appelle généralement « hébreu mishnique » (HM). Il y a plusieurs différences notables avec l’HB :
-        L’emploi du système verbal diffère : l’accompli est vraiment un passé et l’inaccompli est un futur ;
-        Certaines formes grammaticales ont évolué (pluriel en ין fréquent, utilisation du ש pour le relatif, etc.)
-        La syntaxe normale est sujet verbe complément (contrairement à l’HB qui met plus volontiers le verbe en premier) ;
-        Le lexique ordinaire appartient à une variante dialectale distincte de l’HB, bien que l’on retrouve certains mots dans le corpus biblique (exemples : HB=> HM, שמש => חמה, עץ => אילן, חפץ => רצה).
-        Un certain nombre de termes techniques sont empruntés aux langues en contact comme l’araméen (surtout sur les aspects juridiques. Ex : מדינה, שטר), le grec (פרצוף, קטגור, סנגור) ou encore le latin (מטרונה).
Le style de la Mishna est très concis et fait pour être appris par cœur. C’est un pur sytle oral.
Le corpus officiel de la Mishna n’est pas le seul témoin de cette couche de rédaction. La tradition tannaïtique est aussi représentée par :
-        des midrashim dit « anciens » ou parfois « halakhiques » car ils constituent une première mise par écrit de la tradition rabbinique naissante, ordonnée selon l’ordre biblique. A contrario, la Mishna constitue une première approche de classement thématique.
-        Le corpus plus tardif de la Tosefta (mot araméen qui signifie « ajouts ») publié vers 300 par l’école de Rabbi Oshaya. Il s’agit d’enseignement tannaïtiques non retenus dans le corpus de la Mishna, organisés selon le même ordre que les traités de la Mishna.
-        Les mishnayot « externes » appelées baraïtot (singulier baraïta) et qui sont citées par la génération suivante, les amoras, dans la guemara des deux talmud, de Babylone ou de Jérusalem.
La Guemara :
La guemara est correspond à des enseignements des amoraïm. Ces rabbins sont les continuateurs des tannaïm. A partir du 3e siècle jusqu’au 5e siècle, le besoin d’expliquer et de discuter la Mishna se fait sentir. La Mishna étant un texte lapidaire et concis, fait pour être appris par cœur, il donne peu d’explication exégétique et ne donne pas d’éléments précis pour trancher entre les diverses opinions qu’il présente. C’est donc la guemara qui a pour fonction d’expliquer.
Le Talmud de Babylone a été rédigé en araméen babylonien mais cite volontiers la Mishna ou des enseignements tannaïtiques extérieurs, baraïtot qui sont des passage en hébreu mishnique.

Selon les critique modernes, notamment David Halivni, la guemara recueille les avis des amoraïm, mais sa compilation finale est le fruit du travail des « stammaïm », auteurs anonymes babyloniens. On leur doit notamment l’articulation logique du texte qui est uniformisée par des formules codifiées et qui constitue l’herméneutique talmudique. Par exemple la formule תנו רבנן ne signifie pas seulement « nos maîtres ont enseigné », mais est la formule consacrée pour introduire une baraïta à l’intérieur de la guemara.

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