lundi 7 février 2011

Etude sur le chapitre 16 du Traité Avot de Rabbi Nathan

La présente étude porte sur le chapitre 16 du Traité Avot de Rabbi Nathan dans sa version A (édition traditionnelle du Talmud de Babylone, fin du seder Neziqin ). Ce chapitre est essentiellement un commentaire midrashique de la phrase de Rabbi Yehoshua du traité Avot chapitre 2,11 [14] : « Rabbi Yehoshua dit : le mauvais œil, le mauvais penchant et la haine des créatures, voilà ce que fait sortir l’homme du monde ».

Le chapitre 16 du traité Avot de Rabbi Nathan est un développement en trois parties inégales des trois concepts énoncés par Rabbi Yehoshua qui font sortir l’homme du monde :
- le mauvais œil ;
- le mauvais penchant ;
- la haine des créatures.



La partie sur le mauvais penchant est la plus développée puisqu’elle englobe deux paragraphes du découpage « officiel », c'est-à-dire identifié par des lettres hébraïques dans l’édition traditionnelle de Vilna :

• paragraphe א : la sentence de R. Yehoshua, puis l’explication sur le mauvais œil introduite par la question : « le mauvais œil, comment ? » ;
• paragraphe ב : l’explication sur le mauvais penchant introduite par la question : « le mauvais penchant, comment ? » ;
• paragraphe ג : suite de l’explication sur le mauvais penchant ;
• paragraphe ה : explication sur la haine des créatures.

On notera qu’il n’y a pas de paragraphe identifié par la lettre ד.


Analyse détaillée

L’analyse de texte qui suit a pour objectif de dégager les éléments théologiques du texte sur le thème du mal et de la souffrance qui est également le thème du séminaire suivi. Lorsque cela est possible, la datation des éléments textuels est réalisée à partir des rabbins aux noms desquels ces traditions sont rapportées.

L’analyse est présentée de façon linéaire et intercalée dans le texte hébreu qui n’est pas traduit, si ce n’est pour les citations qui étayent l’analyse. Les termes ou les expressions linguistiquement difficiles sont discutées dans le cas où leur compréhension impacte directement la compréhension théologique du texte.

)א(
רבי יהושע אומר:
עין הרע ויצר הרע ושנאת הבריות מוציאין את האדם מן העולם.

Datation du passage :
Cette sentence tirée du traité Avot 2,11 est attribuée à Rabbi Yehoshua (ben Hananya), Tanna de la troisième génération (T3) selon le décompte d’Adin Steinsaltz , de la deuxième génération selon le décompte de Raphaël Halperin . Il s’agit du célèbre maître qui est souvent opposé à son collègue Rabbi Eliezer (ben Hyracanos).

« Faire sortir l’homme du monde » : presqu’aucun commentateur ne s’applique à expliquer cette phrase dont la syntaxe est étrangère à notre pensée occidentale moderne. Le dictionnaire Jastrow qui identifie précisément ce verset à la rubrique יצא comprend les choses ainsi : « take the man out of the world i.e. cause him to loose the true enjoyment of life ». On peut légitimement penser que « sortir du monde » est un processus qui commence en effet par la perte du goût de la vie et se termine par la mort biologique effective et même l’impossibilité de participer au monde à venir. Le commentaire Ikar Tosfot Yom Tov sur Avot 2,11 tente d’expliquer pour chaque élément (mauvais œil, mauvais penchant et haine des créatures) quel peut-être le processus qui mène finalement à la mort.

L’optique théologique de l’expression « faire sortir l’homme hors du monde » est principalement celle de la responsabilité des actes du monde présent qui sont censés provoquer la perte du goût de la vie et à terme, soit allongement, soit diminution de la vie biologique terrestre. La perspective de cette expression n’est pas celle d’un Dieu interventionniste qui ferait mourir le méchant prématurément ou qui prolongerait artificiellement la vie du juste, mais pose plutôt la question de la conséquence des actes humains, leur effet direct sur l’homme qui les commet. Il s’agit donc d’une réflexion bâtie autour de la responsabilité individuelle de chaque homme dans le choix de ses actes moraux et qui de ce fait n’aborde pas la question du mal injuste subi par l’innocent ou d’une rétribution par intervention divine.

Le texte va maintenant développer chacun des trois points. Tout d’abord, le Mauvais Œil (la jalousie), comment peut-il faire sortir l’homme du monde ?

עין הרע כיצד?
מלמד שכשם שאדם רואה את ביתו של עצמו, כך יהא רואה ביתו של חברו.
וכשם שאדם רוצה שלא להוציא שם רע על אשתו ובניו,
כך יהא אדם רוצה שלא להוציא שם רע על אשת חברו ועל בניו של חברו.
דבר אחר: עין הרע כיצד? שלא תהא עינו של אדם צר במשנתו של חברו.
מעשה באדם אחד שהיה עינו צרה במשנתו של חברו נתקצרו חייו ונפטר והלך לו:

Datation du passage :
Cette partie de texte n’est pas facilement datable car il n’y a aucune mention du nom d’un rabbin.

Eléments linguistiques :
עין צרה = קנאה : jalousie.
משנתו = son étude. Litt. « ce qu’il répète » (sa mishna), c'est-à-dire sa connaissance de la Tora, ce qu’il a appris par cœur. En effet, à cette époque l’apprentissage par cœur et la transmission orale des enseignements des rabbins est capitale et c’est de là que dérive le terme Mishna, répétition.

Le texte donne des exemples du Mauvais Œil qui est la jalousie, l’œil qui regarde au mauvais endroit, l’œil qui convoite : jalousie de la maison (famille) du prochain, de sa femme, de ses enfants, mais aussi de son étude, c'est-à-dire ses connaissances en matière de Tora. Un récit très court et vraisemblablement factice est présenté à titre d’illustration : celui qui a jalousé l’étude de son prochain a vu ses jours raccourcis et à trouvé la mort. L’idée ici est de montrer par l’exemple que la vie du méchant est écourtée. A ce titre, on est proche de la doctrine biblique qui veut que Dieu prolonge la vie des justes et écourte celle des méchants. Il faut noter que l’emploi de verbes à la forme passive dans l’hébreu d’origine (sa vie est écourtée, il décède et s’en va) entretient une ambiguïté sur l’interventionnisme possible de Dieu : soit son intervention est suggérée et implicite, soit on peut comprendre le raccourcissement de la vie du méchant et son décès comme une conséquence directe de sa jalousie.

(ב)

יצר הרע כיצד?

Le texte se penche à présent sur le Mauvais Penchant : comment fait-il sortir l’homme hors du monde ?

אמרו שלוש עשרה שנה גדול יצר הרע מיצר טוב. ממעי אמו של אדם היה גדל ובא עמו.
והתחיל מחלל שבתות אין ממחה בידו,
הורג נפשות אין ממחה בידו,
הולך לדבר עבירה אין ממחה בידו.

Eléments linguistiques :
מיחה ב / ביד פלוני = to forewarn, interfere, try to prevent, prohibit. (prévenir, interférer, essayer de prévenir, interdire) in Jastrow.

Le texte indique que jusqu’à l’âge de treize ans, le mauvais penchant l’emporte sur le bon penchant. Treize ans est l’âge de la majorité religieuse à partir duquel le Juif est soumis à l’observance intégrale des commandements. On peut donc établir que le texte fait un lien entre pratique des commandements et développement du Bon Penchant. C'est-à-dire que la pratique des commandements permet de développer le penchant au bien, l’inclination et la facilité à faire le bien et du même coup de faire régresser le mauvais. En d’autres termes, la pratique du bien est un cercle vertueux et comme d’autres l’écriront plus tard : l’accomplissement d’une mitzva engendre l’accomplissement d’une autre mitzva, et une transgression appelle une autre transgression (voir Avot 4,2 ).

Le texte donne ensuite une indication intéressante sur l’origine du Mauvais Penchant : « depuis le sein de sa mère, le mauvais penchant se développe et accompagne l’homme ». A l’instar du psaume 51,7 (« pécheur m’a mère m’a conçu » ), l’idée principale est celle d’une incapacité fondamentale et initiale de l’homme à pouvoir faire le bien.

Le texte donne ensuite trois transgressions pour lesquelles rien ni personne n’empêche le mineur de les effectuer : violation du Shabbat, meurtre, transgression (probablement sexuelle comme la suite du texte le confirme). On peut penser que l’expression אין ממחה בידו sous-entend que le Bon Penchant n’est pas là, ou pas suffisamment développé pour prévenir le péché et laisse donc la place au Mauvais Penchant. Comme la suite du texte va le montrer, c’est la Tora elle-même qui prévient le péché et qui est identifiée au Bon Penchant.

לאחר י"ג שנה נולד יצר טוב.
כיון שמחלל שבתות, אומר לו: ריקה הרי הוא אומר: (שמות לא) "מחלליה מות יומת".
הורג נפשות, אומר לו: ריקה הרי הוא אומר: (בראשית ט) "שופך דם האדם באדם דמו ישפך".
הולך לדבר עבירה, אומר לו: ריקה הרי הוא אומר: (ויקרא כ) "מות יומת הנואף והנואפת".

Eléments linguistiques :
ריקה, ריקא : de ריק vide : « bon à rien » .


Le texte parle à présent du Bon Penchant et établit son apparition après treize ans soit après la majorité religieuse. Il y a là une contradiction : d’abord le texte a dit que le Mauvais Penchant était plus grand que le Bon jusqu’à treize ans, puis il situe l’apparition du Mauvais dès la conception pour finalement dire que le Bon n’apparaît qu’à l’âge de treize ans ! Peut-être faut-il entendre dans le mot exact נולד (litt. « né ») l’idée que jusqu’alors, le Bon Penchant existait mais seulement sous forme embryonnaire ? Dès lors qu’il est « né », il devient, en quelque sorte, opérationnel et non plus seulement en gestation, en potentialité.

Le texte reprend comme illustration les trois exemples cités pour les transgressions provoquées par le Mauvais Penchant : violation du Shabbat, meurtre, transgression sexuelle. Pour chacun, il présente un avertissement sévère à l’encontre de la personne qui s’apprête à pécher (qualifié de Rekka : idiot, bon à rien) en citant un verset de la Torah qui interdit précisément chaque transgression en la punissant de mort :
- Ex 31,4 : « celui qui viole les Shabbats sera mis à mort » ;
- Gn 9,6 : « celui qui verse le sang de l’homme, par l’homme son sang sera versé » ;
- Lv 20,10 : « celui ou celle qui commet l’adultère sera mis à mort ».

Nous avons ici la confirmation du lien dont nous avons déjà parlé plus haut entre Bon Penchant et pratique des commandements : dès lors que l’homme juif atteint l’âge de treize ans, l’obligation de pratiquer les commandements est corrélée avec l’état « opérationnel » du Bon Penchant en lui. On peut parler de confirmation car les éléments nouveaux par rapport au passage qui précède sont les versets de la Tora.

Mais il devient de plus en plus clair que le Bon Penchant est la Tora elle-même dans son rôle d’avertissement et de punition de la faute. La Tora en édicte des menaces extérieures sur l’homme : s’il transgresse, il sera mis à mort, ou bien, un homme versera son sang (le tuera). Le Bon Penchant ne peut en aucun cas être compris comme une force intérieure qui prédispose l’homme à accomplir les commandements et à s’abstenir de pécher, mais comme l’intériorisation de l’ordre donné par la Tora et la sanction qui lui est associé en cas de non respect.

Une recherche sur l’expression מות יומת « il sera mis à mort » dans le corpus rabbinique montre que des sources anciennes telles que Mekhilta Neziqin 4 et 5 et des textes similaires dans les Sifré et Sifra discutent des modalités de mise à mort (lapidation, pendaison) précisément pour ces trois transgressions. Il est possible que ces traditions remontent à l’époque du Temple pendant laquelle le Sanhédrin avait encore autorité pour prononcer ces sentences et les mettre en application.
Il n’est pas l’objet de ce devoir de faire état de la question, mais pour les sources moins anciennes, notamment des deux Talmuds, il semble que les discussions portent sur des aménagements de ces peines et que les questions de mise à mort réelles revêtent un caractère davantage casuistique et théorique.

A cet égard, la citation du verset biblique שופך דם האדם באדם דמו ישפך est assez explicite quand à l’auteur de la punition : il s’agit d’un autre homme qui est l’instrument de l’exécution de la sentence et non Dieu directement. Pourtant, des sources ultérieures comprennent ce verset non comme une peine de mort infligée par un tribunal, mais comme un raccourcissement des jours (de façon analogue à la transformation du concept biblique de כרת « excommunication / retranchement » qui se mue en « retranchement » au sens de diminution du nombre de jours de la vie) ou même comme une peine de Géhenne dans le monde à venir.

Cependant, pour notre texte, il n’est pas évident du tout de comprendre le terme Bon Penchant comme une sorte de force intérieure ou de vertu. Il apparaît que c’est la Tora elle-même qui constitue le Bon Penchant et qui joue un rôle préventif, non seulement en énonçant l’interdiction, mais surtout en menaçant de punition.


בזמן שאדם מחמם את עצמו, והולך לדבר זימה, כל אבריו נשמעין לו, מפני שיצר הרע מלך הוא על מאתים וארבעים ושמונה אברים.
כשהוא הולך לדבר מצווה, התחילו מתעצלים לו כל אבריו, מפני שיצר הרע שבמעיו מלך הוא על מאתים וארבעים ושמונה אברים שבאדם.

Eléments linguistiques :
דבר זימה : d’après Jastrow « improper conduct » : inconduite.

Ce passage souligne que le Mauvais Penchant est le maître du corps : lorsque l’homme se met en marche pour commettre une inconduite, tous ses membres répondent et s’activent, mais lorsqu’il s’agit d’accomplir un commandement, ils font preuve de paresse. Le texte confirme la vision évoquée plus haut : le Mauvais Penchant présent depuis la conception de l’homme et présent dans ses membres d’une façon quasi intrinsèque.


ויצר טוב אינו דומה אלא למי שהוא חבוש בבית האסורין, שנאמר: (קהלת ד) "כי מבית הסורים יצא למלוך" זה יצר טוב.

Après avoir présenté le Mauvais Penchant comme celui qui règne sur les 248 membres de l’homme, le Bon Penchant est comparé à un prisonnier qui doit sortir de sa prison pour régner.


ויש אומרים: זה יוסף הצדיק. כשבאתה אותה רשעה היתה מענה אותו בדבריה.
אמרה לו: אני אחבשך בבית האסורין,
אמר לה: ה' מתיר אסורים,
אמרה לו: אני אנקר את עיניך,
אמר לה: ה' פוקח עורים,
אמרה לו: אני אכפוף את קומתך,
אמר לה: ה' זוקף כפופים,
אמרה לו: אני עושה אותך רשע,
אמר לה: ה' אוהב צדיקים,
אמרה לו: אני עושה אותך ארמאי,
אמר לה: ה' אוהב את גרים,
עד שאמר "איך אעשה הרעה הגדולה הזאת".

Le texte présente ensuite un midrash sur Joseph, le fils de Jacob, appelé Joseph le Juste par les Sages. Le midrash met en scène la femme de Potiphar (Gn 39,7 et suivants) qui provoque Joseph pour commettre l’adultère. Celle-ci est ici mentionnée simplement comme « cette méchante » (ou cette impie). A chaque menace de la femme méchante, Joseph répond par un verset biblique.

L’idée essentielle de ce texte est l’appui sur la Tora pour réfuter les tentations. Contrairement aux paragraphes précédents, le Bon Penchant est ici, non plus une menace de punition et un garde-fou, mais davantage une aide intérieure pour contrer les attaques et les menaces du Mauvais Penchant. On peut voir « cette méchante » comme une personnalisation du Mauvais Penchant et Joseph du Bon Penchant. A l’instar du Joseph biblique qui est sorti de prison à plusieurs reprises, le Bon Penchant doit lui aussi, au terme d’une lutte qui s’appuie sur la connaissance de la Tora et des Prophètes, sortir de sa prison.

אל תתמה על יוסף הצדיק, שהרי רבי צדוק היה גדול הדור כשנשבה.
נטלתו מטרוניתא אחת ושגרה לו שפחה אחת יפה.
כיון שראה אותה, נתן עיניו בכותל שלא יראנה, והיה יושב ושונה כל הלילה.
לשחרית הלכה והקבילה אצל גבירתה.
אמרה לה: שווה לי המות משתתנני לאיש הזה.
שלחה וקראה לו, ואמרה לו: מפני מה לא עשית עם אישה זאת כדרך שיעשו בני אדם?
אמר לה: ומה אעשה, מכהונה גדולה אני, ממשפחה גדולה אני, אמרתי שמא אבוא עליה והרביתי ממזרים בישראל.
כיון ששמעה דבריו צותה עליו ופטרתו בכבוד גדול.


Datation du passage :
Rabbi Tsadoq n’est pas identifié dans la liste donné par A. Steinsaltz dans son Guide et Lexique. Raphaël Halperin l’identifie comme Tanna de la première génération, c'est-à-dire correspondant à T2 de Steinsaltz mais le place à la fois auprès de R. Yohanan Ben Zakaï, T2 (40-80) et comme contemporain de R. Yehoshua et R. Eliézer, T3 (80-110). En TB Guittin 56a, il est mentionné que Rabbi Tsadoq a jeûné pendant 40 ans pour que Jérusalem ne soit pas réduite en ruine. On peut donc supposer que sa période d’activité fut après la révolte de 70 et que la ruine qu’il prévient par son jeûne est celle de la révolte de 135. Si on se fie à ce texte, sa période d’activité pourrait donc être intermédiaire entre les générations T2 et T3, soit 70-110.

Eléments linguistiques :
מטרוניתא : du latin « matrona » : femme mariée.
נִשְׁבָּה : être capturé, être captif.
פטר : ici, vraisemblablement utilisé dans le sens de : se séparer de / laisser / abandonner.

Comme dans le cas de Joseph, R. Tsadoq est tenté sexuellement. Mais cette fois, par une servante envoyée par sa maîtresse. Comme le suggère le titre de « matrone » et la peur de donner naissance à un bâtard énoncée par R. Tsadoq, la maîtresse comme la servante sont des païennes. Ce qui importe au texte n’est pas tellement l’intention de ces dernières, mais plutôt de souligner que cet évènement est vécu par le Sage comme une tentation du Mauvais Penchant. Encore une fois, le Bon Penchant se manifeste ici par l’étude de la Tora : והיה יושב ושונה כל הלילה il était assis et répétait (étudiait) toute la nuit. Comme pour le texte précédent, ce n’est pas la menace de la punition contenue dans la Tora qui constitue le Bon Penchant, mais bien plutôt l’étude de la Tora elle-même. Cette étude permet à R. Tsadoq de construire sa réponse, sous forme de trois affirmations et qui vont finalement éloigner la femme tentatrice.

ואל תתמה על רבי צדוק, שהרי ר' עקיבא גדול ממנו.
כשהלך לרומי אוכילו קורצא אצל שלטון אחד, ושיגר לו שתי נשים יפות. רחצום וסכום וקשטום ככלות חתנים, והיו מתנפלות עליו כל הלילה. זאת אומרת חזור אצלי, וזאת אומרת חזור אצלי.
והיה יושב ביניהם ומרקק, ולא פנה אליהן.
הלכו להן והקבילו פני השלטון, ואמרו לו: שווה לנו המות משתתננו לאיש הזה.
שלח וקרא לו, אמר לו: מפני מה לא עשית עם הנשים הללו כדרך שבני אדם עושים לנשים? לא יפות המה, לא בנות אדם כמותך הן, מי שברא אותך לא ברא אותם?
אמר לו: מה אעשה, ריחן בא עלי מבשר נבלות וטרפות ושרצים.

Datation du passage :
Rabbi Akiva appartient à la quatrième génération des Tannaïm (T4), c'est-à-dire les années 110-135.

Eléments linguistiques :
אכל קורצא : Jastrow : to inform against. Le texte de Avot de Rabbi Nathan est mentionné dans Jastrow à l’occurrence קרצא / קורצא mais sans parvenir à traduire ce passage.
ריקק : cracher.

Rabbi Akiva repousse les deux belles femmes toutes parées grâce à l’étude de la Tora, si l’on considère que le verbe יושב fait référence à cette étude, et aussi en crachant, ce qui vraisemblablement une pratique thaumaturgique destinée à éloigner le mal . L’explication donnée par Rabbi Akiva est que leur odeur annonce l’obscénité (נַבְלוּת : Jastrow : obscenity, levity), la nourriture impure (טרפות) et les reptiles impurs (שרצים) : trois choses ayant un lien avec l’idée d’impureté, même si seul le שרץ est une des sources d’impureté rituelle (אבות הטומאה).

אל תתמה על ר' עקיבא, שהרי רבי אליעזר הגדול גדול ממנו, שגדל את בת אחותו י"ג שנה עמו במטה עד שבאו לה סימנים.
אמר לה: צאי והתנשאי לאיש.
אמרה לו: הלא אמתך אנכי לשפחה לרחוץ רגלי תלמידך.
אמר לה: בתי כבר זקנתי, צאי והתנשאי לבחור שכמותך.
אמרה לו: לא כך אמרתי לפניך, הלא אמתך אנכי לשפחה לרחוץ רגלי תלמידך.
כיון ששמע את דבריה, נטל ממנה רשות לקדשה ובא עליה:

Eléments linguistiques :
סימנים : סימני נערוּת : Jastrow : evidence of puberty : des signes de puberté.

Datation du passage :
Rabbi Eliezer (ben Hyrcanos) : T3 : années 80-110, aussi appelé Rabbi Eliezer le Grand.

Ce passage possède un parallèle dans le Talmud de Jérusalem : Yevamot 71a chapitre 13 halakha 2 :
אמר ר' אבהו מעשה באמו של ר' ליעזר שהיתה דוחקת בו לשאת את בת אחותו והיה אומר לה בתי לכי הינשאי בתי לכי הינשאי. עד שאמרה לו הרי אני שפחה לך לרחוץ רגלי עבדי אדוני אעפ"כ כנסה ולא הכירה עד שהביאה שתי שערות.

Tal Ilan considère qu’il y a peut-être une faute de copiste entre אמו של et אימא שלו et אימא שלום : se mère / Imma shalom . Mais ce qui est intéressant de souligner, dans le contexte du Bon et du Mauvais Penchant qui nous occupe, est la présence dans le texte des trois points suivants :
- Imma Shalom est fille de sa sœur, ou bien selon d’autres traditions, la fille ou la sœur de Rabban Gamliel ;
- la mention de la majorité religieuse : 13 ans, âge de la « naissance » du Bon Penchant ;
- le respect halakhique de l’inspection du développement corporel de la candidate au mariage qui correspond à l’atteinte de l’âge de la puberté.


(ג)
רבי ראובן בן אצטרובלי אומר: היאך מתרחק אדם מיצר הרע שבמעיו, לפי שטיפה ראשונה שאדם מטיל באישה הוא יצר הרע.
ויצר הרע אינו שרוי אלא על מפתחי הלב, שנאמר: (בראשית ד) "לפתח חטאת רובץ".
אמר לו לאדם בשעה שהתינוק מוטל בעריסה האיש מבקש להורגך, הוא רוצה שיתלוש ממנו בשערו.
תינוק מוטל בעריסה הניח ידו על גבי נחש או על גבי עקרב ועקצתו, לא גרם לו אלא יצר הרע שבמעיו
הניח ידו על גבי גחלים ונכוה, לא גרם לו אלא יצר הרע שבמעיו, לפי שיצר הרע זורקו בבת ראש.
אבל בוא וראה בגדי או בטלה, כיון שהוא רואה את הבאר, הוא חוזר לאחוריו, לפי שאין יצר הרע בבהמה.


Eléments linguistiques :
שרוי : présent, demeurant, existant.
תלש : être déraciné, arraché.
עקץ : piquer / mordre.

Datation du passage :
ר' ראובן בן אצטרובלי / איסטרובלי : R. Reuven ben Estrobali : Tanna de la quatrième génération selon R. Halperin (équivalent chez Steinsaltz : T5 : 135-170) de l’époque de R. Shimon bar Yohaï. Deux de ses fils furent disciples de Rabbi (Yehouda Hannassi) et Rav a transmis des paroles en son nom (Raphaël Halperin ).

Rabbi Reuven ben Estrobali présente ici à nouveau la thèse du Mauvais Penchant créé dès l’origine puisque « la première goutte [de semence] déposée dans la femme, c’est le Mauvais Penchant ». Cette idée est sans doute à rapprocher de la théologie paulinienne du péché originel, voire de certaines approches théologiques, juives ou chrétiennes voyant dans l’acte sexuel un « mal nécessaire » à la procréation.
Rabbi Reuven ben Estrobali pose donc la question : comment s’éloigner du Mauvais Penchant qui est dans ses tripes [en lui-même] ? Rabbi Reuven apporte d’abord une précision qui contrebalance ses premières affirmation : le Mauvais Penchant se trouve à la « porte du cœur » tout comme la bête tapie de Genèse 4,7, verset qui est cité en appui : « le péché n'est-il pas à la porte, [une bête tapie qui te convoite, pourras-tu la dominer] ? ».
Vient ensuite une curieuse comparaison : Rabbi Reuven compare le nourrisson qui approche sa main du serpent ou du scorpion et qui voit dans cette absence de conscience du mal la marque du Mauvais Penchant. A l’opposé, il signale que le chevreau ou l’agneau ne tombe pas dans un puis et en déduit donc que le Mauvais Penchant n’existe pas chez l’animal. En termes moderne, on dirait que l’animal possède un instinct alors que l’homme n’a pas cette connaissance innée du bien et du mal. « Il n’y a pas de Mauvais Penchant dans l’animal » est la conclusion logique de ce passage, bien que venant après une démonstration pour le moins curieuse à notre pensée moderne.
.
רבי שמעון בן אלעזר אומר: אמשול לך משל, למה הדבר דומה:
יצר הרע דומה לברזל שהטילוהו בתוך האור. כל זמן שהוא בתוך האור, עושין ממנו כל כלים שירצו.
אף כך יצר הרע אין לו תקנה אלא בדברי תורה שהן כאש, שנאמר: (משלי כה) "אם רעב שונאך האכילהו לחם, ואם צמא השקהו מים, כי גחלים אתה חותה על ראשו, וה' ישלם לך".
אל תקרי 'ישלם לך' אלא 'ישלים לך'.

Datation du passage :
R. Shimon ben Eléazar : tanna de la sixième génération (Steinsaltz T6 : 170-200) : le disciple le plus significatif de R. Méir.

Rabbi Shimon ben Eléazar se sert quant à lui de la comparaison (mashal) du Mauvais Penchant avec une barre de fer : tant qu’elle est plongée dans le Feu, représentant la Tora, il est possible d’en faire tous les objets que l’on veut. Cette remarque est intéressante et plus aboutie encore que les approches très tranchées relevées précédemment : en effet, elle ne se contente pas de définir le Bon et le Mauvais Penchants, mais propose une vision globale de cohabitation des deux penchants. Le penchant au mal étant quelque chose d’intrinsèque à l’homme, il n’est pas possible de le déraciner, mais il faut le soumettre à la pratique de la Tora pour pouvoir le maîtriser et le mettre au service de Dieu. R. Shimon cite en appui le verset suivant : Pr 25,21-22 « Si ton ennemi a faim, donne-lui à manger, s'il a soif, donne-lui à boire, c'est amasser des charbons sur sa tête et le Seigneur te le revaudra ». Mais il lit la dernière expression ישלם לך « te le paiera / revaudra » de la manière suivante : ישלים לך que l’on peut traduire par « terminera pour toi » au sens de « vaincra » comme le propose le commentaire traditionnel Binyan Yehoshua (בניין יהושע) de l’édition de Vilna.

רבי יהודה הנשיא אומר: אמשול לך משל למה הדבר דומה:
יצר הרע דומה לשני בני אדם שנכנסו לפונדק אחד. נתפס אחד מהם משום לסטות.
אמרו לו: מי עמך? יכול הוא שיאמר 'לא היה עמי חברי'. אלא אומר: הואיל ואני נהרג, יהרג חברי עמי.
אף כך אומר יצר הרע: הואיל ואני אבוד לעולם הבא, אני אאבד את כל הגוף.

Datation du passage :
Rabbi Yehouda Hannassi (Juda le Prince dit aussi Hakadosh, le Saint) : Steinsaltz T6, 170-200 est le célèbre compilateur de la Mishna.

Rabbi Yehouda Hannassi rapporte également un mashal : deux hommes qui entrent dans une auberge et l’un d’eux est pris dans une bagarre et on lui demande : qui est avec toi ? Il pourrait dire « je n’avais pas de compagnon avec moi » mais il dit « quitte à ce que je sois tué, que mon compagnon le soit avec moi ». Ainsi raisonne le Mauvais Penchant : « puisque de toute façon je suis perdu pour le monde à venir, je vais perdre le corps entier ».
On peut résumer en disant que le Mauvais Penchant n’a rien à perdre. Il n’est pas évident de déduire une croyance ou une vision théologique particulière de ces paroles. Il faut davantage les voir comme une invitation personnelle à la méditation et à l’édification morale et spirituelle : qui est tenté par le Mauvais Penchant doit savoir que ce dernier n’a rien à perdre et donc orienter ses choix en fonction de cette donnée.


רבי שמעון בן יוחי אומר: מכאן שאין ישראל רואים פני גיהנם לעולם.
משלו משל, למה הדבר דומה? למלך בשר ודם שהיה לו שדה זבורית. באו בני אדם והשכירוה בעשרת כורין חטים בשנה. זיבלוה, עדרוה, השקוה וכסחוה, ולא הכניסו ממנה אלא כור אחד חטים בשנה.
אמר להם המלך: מהו זה?
אמרו לו: אדונינו המלך, אתה יודע בשדה שנתת לנו, שמתחלה לא הכנסת ממנה כלום. ועכשיו שזבלנוה וכיסחנוה והשקינוה מים, לא הכנסנו ממנה אלא כור אחד חטים בלבד.
כך עתידים ישראל לומר לפני הקדוש ברוך הוא: ריבונו של עולם, אתה יודע ביצר הרע שהוא מסית בנו, שנאמר: (תהלים קג) "כי הוא ידע יצרנו":

Eléments linguistiques :
זיבורית : Jastrow : lowest land.
כור : la plus grande mesure de volume, correspondant à 30 séas (248 l d’après Rav Naé, 430 l d’après le Hazon Ish) Steinsaltz p. 259.
זיבל : Jastrow : to deposit foliage in the field for manure, to manure (mettre du fumier)
עדר / עידר : Jastrow : to pluck, clear (of weeds), to hoe, to pick (arracher les mauvaises herbes, désherber, biner, sarcler).
כסח / כיסח : Jastrow : to cut down, clear (of thorns, bushes, etc.) : émonder, enlever les buissons, les épineux.
הֵסית : Jastrow : to cause to do, stir up, instigate (provoquer, instiguer).

Datation du passage :
Rabbi Shimon ben Yohaï : Steinsaltz : T5 : 135-170, Tanna de la cinquième génération, l’un de plus grand de sa génération, disciple de Rabbi Akiva. Il a eu comme disciples Rabbi Eliezer et Yehuda Hannassi.

Ce texte de R. Shimon ben Yohaï est le plus nuancé de toutes les sentences sur le Mauvais Penchant du chapitre 16 d’Avot de Rabbi Nathan. Il compare la vie morale et spirituelle au champ d’un roi qui est loué à des hommes d’Israël pour qu’il produise du fruit. Le texte souligne tous les efforts des hommes aux travaux des champs (suppression des buissons, des épineux, sarclage et fumage) qui représentent évidemment les efforts des hommes dans le sens de l’obéissance aux commandements et à la Tora. Mais, le résultat n’est pas à la hauteur des efforts et le champ produit moins qu’escompté. R. Shimon ben Yohaï met alors dans la bouche des hommes accusés par Dieu pour le piètre résultat le verset suivant : (Ps 103,14) « car il connaît notre penchant ». Ce texte souligne donc avec un certain pessimisme l’impossibilité de réaliser la perfection à cause de l’action inévitable du Mauvais Penchant. Mais il sous-entend aussi que Dieu peut récompenser et accepter l’homme malgré tout, en tenant compte de son incapacité foncière à respecter entièrement les commandements, du moment que les efforts pour produire un bon fruit sont là.


(ה)

ושנאת הבריות כיצד?
מלמד שלא יכווין אדם לומר אהוב את החכמים ושנא את התלמידים, אהוב את התלמידים ושנא את עמי הארץ, אלא אהוב את כולם, ושנא את האפיקורסין והמסיתים ומדיחין, וכן המסורות.
וכן דוד אמר (תהלים קלט) "משנאיך ה' אשנא ובתקוממיך אתקוטט תכלית שנאה שנאתים לאויבים היו לי" הלא הוא אומר (ויקרא יט) "ואהבת לרעך כמוך אני ה'" מה טעם "כי אני בראתיו"?
- ואם עושה מעשה עמך אתה אוהבו, ואם לאו אי אתה אוהבו.

Cette partie du texte est à nouveau non datable car la tradition n’est rapportée par aucun rabbin. Il s’agit ici d’un développement anonyme sur la sentence initiale de R. Yehoshua :
עין הרע ויצר הרע ושנאת הבריות מוציאין את האדם מן העולם.
Le texte s’explique ici sur « la haine des créatures », et pose la question : en quoi fait-elle sortir l’homme du monde ? En réalité, le texte ne s’intéresse pas au fondement de l’interdiction de haïr les créatures, mais plutôt à préciser qu’il existe des exceptions dans les personnes haïssables. Il est interdit de faire une distinction entre Sages et Amé Haaretz, les juifs peu scrupuleux dans l’observance de la Tora. En revanche il est autorisé de haïr les Epicuriens (qu’il faut sans doute comprendre dans un sens plus général comme athées, juifs impies) et les tentateurs. Pour argumenter cette autorisation de haïr, plusieurs versets sont rapportés : (Ps 139, 21-22) : « Seigneur n'ai-je pas en haine qui te hait, en dégoût, ceux qui se dressent contre toi? Je les hais d'une haine parfaite, ce sont pour moi des ennemis. ». Les versets parlent d’eux-mêmes. Suit une explication du fameux verset du Lévitique (Lv 19,18) « tu aimeras ton compagnon comme toi-même, je suis le Seigneur » assorti d’un extrait d’Isaïe (Is 45,8) « Je suis le Seigneur qui t’ai créé ». L’association de ces deux versets est une explication de type midrashique sur le mot « créatures » (בריאות). Le verset d’Isaïe 45,8 comporte en effet « je suis le Seigneur » également présent dans Lv 19,18 : cet élément sert de pont entre בראתיו qui fait référence à בריאות les créatures (même racine et anagramme des lettres). On peut donc reconstituer la pensée en faisant la synthèse des deux versets : tu aimeras ton prochain comme toi-même, car c’est moi, le Seigneur, qui t’ai créé. Et le texte de commenter : s’il fait une œuvre avec toi, aime-le sinon, ne l’aimes pas.


ר' שמעון בן אלעזר אומר: בשעה של גדולה נאמר דבר זה:
"ואהבת לרעך כמוך" - אני ה' בראתיו. אם אתה אוהבו, אני נאמן לשלם לך שכר טוב. ואם לאו - אני דיין לפרוע:

Eléments linguistiques :
פרע : Jastrow : to tear, destroy ; to loosen, disarrange / to uncover.

Datation du passage :
Rabbi Shimon ben Elazar est un tanna de la sixième génération : T6, 170-200, le disciple le plus éminent de Rabbi Méir.

Ce passage est dans la continuité du précédent et présente une lecture combinée des deux versets du psaume et d’Isaïe que nous avons suggérée plus haut et y rajoute une récompense pour l’application du de l’amour du compagnon et dans le cas contraire une punition.
Conclusion

Au terme de cette brève analyse, il apparaît que ce chapitre 16 du traité Avot de Rabbi Nathan est constitué d’éléments textuels non datables mais vraisemblablement tannaïtiques puisque s’harmonisant bien avec les parties datables qui sont essentiellement des citations de tannaïm allant de la deuxième à la sixième génération.

Pour ce qui concerne précisément le long passage sur le Yetser Hara, le Mauvais Penchant, il apparaît difficile de corréler une certaine théologie du Mauvais Penchant avec une génération précise ou de remarquer une quelconque évolution vers une tendance. Les Tannaïm ne sont pas cités par ordre chronologique, car la présentation générale du Yetser Hara suit vraisemblablement une logique didactique :
- définition de l’origine et de l’essence du Mauvais Penchant basée essentiellement sur la citation de verset (textes non datés) ;
- présentation du combat de Joseph et de différents Sages (R. Tsadoq, R.Akiva, R. Eliézer) contre le Mauvais Penchant ;
- meshalim et comparaisons visant à l’édification morale et à convaincre de la bonne conduite à adopter (R. Reuven ben Estrobali R. Shimon ben Elazar R. Yehouda Hannassi R. Shimon ben Yohaï).

Pourtant, on peut dégager des traits communs aux différentes approches du Yetser Hara présentées dans ce texte :
- à aucun moment il ne revêt la forme d’un Ange tentateur ou n’est associé clairement au Satan ;
- le Mauvais penchant est certes tentateur mais revêt plutôt la forme d’une femme tentatrice pour commettre un acte sexuel interdit ;
- son antidote n’est nullement le Yetser Tov, le Bon Penchant, mais bien plutôt l’étude et la pratique de la Tora.

Il apparaît également chez certains rabbins (Rabbi Reuven ben Estrobali et Rabbi Shimon ben Yohaï) que le Yetser Hara présente des analogies avec la notion de péché originel tel que formulé par Paul dans le chapitre 5 de la lettre aux Romains, notamment à cause des éléments suivants :
- le caractère transmissible du Yetser Hara aux descendants : « la première goutte [de semence] déposée dans la femme, c’est le Mauvais Penchant » dit R. Reuven ben Estraboli ;
- le fait que la présence du Yetser Hara fausse la capacité de l’homme à pouvoir s’abstenir de pécher malgré sa bonne volonté, comme l’énonce R. Shimon ben Yohaï.

On peut donc en conclure que, chez les Tannaïm, le Yetser Hara n’est pas un tentateur personnifié tel qu’on peut en parler plus tard , mais plutôt une incapacité fondamentale à respecter les commandements divins. L’antidote de ce Yetser Hara n’est autre que la Tora, par ses aspects de mise en garde mais aussi par les ressources spirituelles que son étude procure.

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